Crois-tu cela ? (Jean 11,20-27 et 20,24-29)

Célébration œcuménique du 22 janvier 2025 au Puy et du 24 janvier à Yssingeaux.

Un problème passionnant

Je crois que beaucoup d’entre nous aiment bien Thomas, car souvent nous lui ressemblons. Il n’est pas toujours simple de croire. Nous aimerions avoir des preuves, des certitudes. Pourtant les certitudes peuvent avoir des conséquences terribles, quand elles signifient l’intolérance et la surdité à ce que l’autre pourrait avoir à nous apprendre. Même quand je crois, je garde des questions, je ne sais pas tout, j’ai encore à découvrir de cet infini qui me dépasse, et voilà qui est extraordinaire. La joie de ne pas tout savoir.

 

On ne résout pas le mystère de Dieu comme un problème mathématique, ce n’est pas la bonne approche. Je n’ai pas de démonstration, je n’ai jamais de preuve. Et pourtant j’y crois. Parce que c’est quelque chose de fort en moi, que je n’explique pas, qui me passionne.

 

Et malgré tout, en dépit des doutes, c’est un bonheur de pouvoir croire.

 

Thomas a entendu parler de la résurrection de Jésus, il a écouté le témoignage des dix autres disciples ; et ça n’a pas suffi. Alors Jésus vient lui-même se révéler, se dévoiler, se découvrir. Et lorsque Thomas rencontre Jésus, le reconnaît, c’est le coup de foudre : « Mon Seigneur et mon Dieu. » Thomas l’a vu. Et nous aussi, comme Thomas, nous pouvons désirer davantage que juste entendre parler de Jésus. Et si Jésus est vraiment vivant, il vient se révéler à nous. Il est celui qui vient dans le monde.

 

Il a fallu plus de temps à Thomas, mais au final il a cette parole que les autres n’ont pas eue, et vraiment inspirée : « Mon Seigneur et mon Dieu. » Mon Seigneur, c’est précisément la traduction d’Adonaï dans l’Ancien Testament. Adonaï est le mot hébreu que les Juifs disent en remplacement, à chaque fois qu’est écrit le nom sacré de Dieu. « Adonaï et mon Dieu », par ce cri du cœur Thomas dit deux fois la divinité de Jésus. En 325 au Concile de Nicée l’Église a pu ainsi affirmer cette double identité de Jésus humain et Dieu, ensemble, uni.

 

Et Thomas le sceptique est devenu Thomas le croyant, tout en restant lui-même et dans la même exigence d’esprit critique et de vérité.

Toi et moi

Quant à Marthe, elle aussi dans le dialogue avec Jésus, et alors même qu’elle est bouleversée parce que son frère Lazare vient de mourir, elle proclame sa foi en répondant : « Oui Seigneur, moi je crois ».

 

Et elle ne croit pas à une doctrine ou à une théorie, mais à la personne de Jésus qui se tient face à elle et qui la regarde. Elle croyait à la résurrection, mais Jésus insiste en disant : « Moi je suis la résurrection et la vie : celui qui croit en moi, même s’il meurt, vivra » (Jean 11,25).

 

Ce « moi je suis » de Jésus a là encore une résonance exacte avec le nom de Dieu, « Je serai qui je serai » ou dans la version grecque « moi je suis l’être », « celui qui est » (Exode 3,14).

 

Et le moi de Marthe qui dit « moi je crois » fait alors écho au moi de Jésus quand il dit « moi je suis ». Croire, c’est la rencontre entre un je et un tu, de personne à personne.

 

De même Thomas ne dit pas « Seigneur et Dieu », il dit « mon Seigneur et mon Dieu ». Il peut maintenant dire je. Ce n’est pas une doctrine, c’est une relation.

Oui Seigneur

Le credo nous invite à dire à notre tour, personnellement : Je crois. Qu’est-ce que ça signifie ? Littéralement faire confiance, se fier à quelqu’un. En langage profane, la foi n’est autre que la confiance.

 

La foi se décline encore en fiabilité, en fidélité, et même en fiançailles.

 

Croire n’engage donc pas la raison seule, mais tout notre être. « Tu aimeras le SEIGNEUR, ton Dieu, de tout ton cœur, de toute ton âme et de toute ta force. » Dieu nous fait confiance le premier, et nous appelle à lui faire confiance en retour. Il désire nouer une alliance avec nous.

 

La foi est au cœur du projet de l’évangile de Jean, qui l’indique explicitement : « Cela a été écrit pour que vous croyiez que Jésus est le Christ, le Fils de Dieu, et pour qu’en croyant vous ayez la vie en son nom. » (Jean 20,31).

 

Il y a là une question décisive, existentielle, qui fonde notre identité et notre vie.

 

Seigneur, nous admirons la foi de Marthe, la foi de Thomas, la foi de l’évangéliste. Fais-nous découvrir ton visage, entendre ta voix dans un sens spirituel, pour que nous puissions te faire confiance et répondre à notre tour ce oui de Marthe comme une évidence du cœur : « Oui Seigneur, moi je crois ».

 

Je veux être relié à toi, que ton amour entre en moi, que je rêve de toi, que tu me saisisses même au-delà de mes interrogations non résolues. Tu m’interpelles sur ce qui me relie à toi, une expérience qui m’a illuminé. Je veux laisser retentir en moi ta question : « Crois-tu cela ? »

 

Amen.

 

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