La création espère (Romains 8,19-25)

Prédication du dimanche 29 septembre 2024 : temps pour la création

La création gémit

Du 1er septembre au 4 octobre, nous sommes dans le temps pour la création, auquel participent un grand nombre d’Églises chrétiennes dans le monde. Et puisque notre Église locale est engagée dans Église verte, je vous propose aujourd’hui un culte sur la création.

 

Le temps pour la création a choisi cette année le thème « Espérer et agir avec la Création », sur la base de ce très beau passage de la lettre aux Romains.

 

Nous abordons souvent les questions écologiques sous l’angle de l’inquiétude pour l’avenir et de l’urgence à agir. Mais ici, nous entendons des paroles autres. Non pas l’écoanxiété, mais l’espérance. Non pas l’urgence, mais l’attente et la persévérance, l’endurance.

 

Vous connaissez la réalité du changement climatique, la responsabilité de l’homme depuis l’âge industriel et l’ère des énergies fossiles. Vous ressentez déjà dans notre région des hivers plus doux qu’il y a seulement quelques décennies. Vous voyez déjà dans le monde la multiplication des phénomènes météorologiques extrêmes, cyclones, tempêtes, inondations, sécheresses, incendies, canicules, qui s’intensifient par l’élévation de la température. Même la Covid serait due à la modification des écosystèmes, qui ont amené au contact de l’homme des espèces sauvages qui ont transmis le virus.

 

Les plantes sont touchées, et des paysages autrefois magnifiques sont irréversiblement abîmés par les humains. Les animaux sont touchés, des espèces disparaissent, la biodiversité recule. Les humains sont touchés, et une fois de plus les plus pauvres, l’Afrique et l’Asie du Sud, et les zones tropicales, avec la chaleur qui devient mortelle lorsqu’elle approche les 50°, avec les cyclones plus violents et la désertification des zones semi-arides. Il y a des enjeux de justice sociale, et de financement de l’atténuation et de l’adaptation au changement climatique.

 

Est-ce un cataclysme, une apocalypse ? La Bible nous amène à un autre regard, à notre vocation aux yeux de Dieu. Il a pour la terre un projet et une promesse.

 

Paul parle premièrement de la souffrance de la création, de ses gémissements, de ses soupirs ; et deuxièmement d’une espérance. Et nous verrons pour finir que cette souffrance et cette espérance est celle de la naissance des fils adoptifs de Dieu.

 

Oui la création souffre, nous en prenons de plus en plus conscience depuis quelques années. Mais déjà dès le troisième chapitre de la Genèse, la souffrance est là. La réalité de notre terre n’est pas le jardin d’Éden que Dieu a voulu pour nous. Les grossesses et les accouchements impliquent des douleurs. La culture du sol s’avère pénible, comme une malédiction.

 

Cultiver le sol, c’est littéralement le servir. Servir comme le service d’un serviteur, ou comme la servitude d’un esclave. Servir comme nous servons Dieu. Alors oui, ce service implique une souffrance. Prendre soin de la terre, c’est une joie par moments, mais c’est aussi un effort. Un effort pour agir, transformer des idées en réalités concrètes, changer ses habitudes. Et simplement faire attention, faire attention à l’autre et à toute la création, contre la facilité de l’égoïsme et de l’indifférence. Aimer, c’est fait de petites attentions.

 

La création gémit sous le dérèglement climatique. Mais déjà, dès Genèse 6, les hommes ont fait n’importe quoi, et voilà le premier cataclysme, qui va détruire toute la terre. La première inondation dans la Bible apparaît, c’est le déluge. La fin du monde est très ancienne.

La terre sauvée

Or voici que Dieu donne une espérance après le déluge. Il a d’abord une pensée. Le Seigneur a dit dans son cœur :

« Je ne maudirai plus la terre à cause des humains, parce que le cœur des humains est disposé au mal depuis leur jeunesse ; et je ne frapperai plus tout ce qui est vivant, comme je l’ai fait. Tant que la terre subsistera, les semailles et la moisson, le froid et la chaleur, l’été et l’hiver, le jour et la nuit ne cesseront pas. » (Genèse 8,21-22).

Il fait une promesse, il s’engage :

« Quant à moi, j’établis mon alliance avec vous et avec votre descendance après vous, avec tous les êtres vivants qui sont avec vous, tant les oiseaux que le bétail et tous les animaux sauvages, avec tous ceux qui sont sortis de l’arche, avec tous les animaux sauvages. J’établis mon alliance avec vous : tous les êtres ne seront plus retranchés par les eaux du déluge, et il n’y aura plus de déluge pour anéantir la terre. » (Genèse 9,9-11).

 

Cette alliance de toute la création nous appelle à faire de la terre ce beau jardin selon l’idée de Dieu. Et Dieu nous assure en retour que la terre ne sera pas détruite, que nous échapperons à la fin du monde.

 

À la fin du Moyen-Âge, après la peste noire, à l’aube de la renaissance, la grande peur des gens, c’était la mort et l’enfer. Et la bonne nouvelle a été annoncée : le Christ nous sauve de la mort et de l’enfer, par la foi, par la grâce.

 

Aujourd’hui nous voulons sauver la terre. Mais nous ne sauverons pas la terre par nos œuvres et nos actes seuls. Notre sauveur, le sauveur du monde, le sauveur de la création toute entière, c’est toujours le Christ, par la foi, par la grâce. Oui toute l’histoire de Dieu avec son peuple nous apprend à crier à lui, et à dire : « Seigneur, sauve-nous ! » Et à croire qu’il nous sauve. C’est là notre espérance.
Par sa promesse, par l’espérance qu’il nous donne, nous sommes sauvés aussi de notre grande peur, de l’écoanxiété qui nous paralyse. Et libérés, nous avons le courage de prendre les mesures nécessaires.

 

« Car c’est dans l’espérance que nous avons été sauvés », dit Paul.

 

Cette espérance nous aide à persévérer, à endurer les souffrances. Cette espérance est comme une grande lumière à l’horizon, comme le jardin, la nouvelle terre, le fleuve et l’arbre de vie au milieu de la ville et des humains, et Dieu au milieu d’eux, lui-même la lumière (Apocalypse 22,1-8).

 

La terre que Dieu crée est belle. Il ne l’abandonnera pas. Et nous sommes dans cette terre en création. Simplement, elle est encore inachevée. Nous l’attendons avec un ardent désir. La réalité terrestre n’a pas encore rejoint la promesse de Dieu. Mais Dieu le créateur est le Dieu vivant, de sorte qu’il crée aujourd’hui, il ne cesse pas de créer. Et il créera demain ce qui aujourd’hui reste encore inaccompli. C’est l’œuvre de Dieu. Et Dieu regarde, et voit tout ce qu’il a créé, c’est très beau (Genèse 1,31).

 

Ésaïe prophétise, il annonce, et Dieu parle en disant :

« Car je crée un ciel nouveau et une terre nouvelle ; on ne se souviendra plus du passé, il ne viendra plus au cœur. Égayez-vous plutôt et soyez pour toujours dans l’allégresse à cause de ce que je crée ; car je crée Jérusalem pour l’allégresse et son peuple pour la gaieté. » (Ésaïe 65,17-18).

 

La révélation des fils de Dieu

Et dans notre passage des Romains, se trouve le mot d’apocalypse. Mais cette apocalypse est belle et heureuse. Elle se traduit révélation, dévoilement. « Car la création attend avec impatience la révélation des fils de Dieu. »

 

Oui quel est le contenu de cette attente, de cette espérance, de cette promesse ? Dans le contexte, nous attendons « l’adoption filiale », « la liberté glorieuse des enfants de Dieu ». Et puis cette « révélation des fils de Dieu », une expression étonnante. D’habitude, on parle du Fils au singulier, du fils unique de Dieu, Jésus Christ. Qui sont ces fils de Dieu ? C’est nous, semble-t-il. Mais pouvons-nous vraiment recevoir ce nom de fils de Dieu ?

 

Oui, dit Paul dans ce chapitre. Nous devenons fils et filles adoptifs de Dieu. Il vient de dire un peu plus tôt :

« Car tous ceux qui sont conduits par l’Esprit de Dieu sont fils de Dieu. En effet, vous n’avez pas reçu un esprit d’esclavage, qui ramène à la crainte, mais vous avez reçu un Esprit d’adoption filiale, par lequel nous crions : Abba ! – Père ! L’Esprit lui-même rend témoignage à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » (Romains 8,14-16).

 

Alors nous comprenons mieux pourquoi il est question de la douleur de l’accouchement. Car une naissance se prépare, la nôtre. Nous allons venir au monde. Nous attendons la naissance. Nous attendons de voir la révélation, la mise en lumière des enfants de Dieu que nous sommes.

 

Ce n’est pas nous seulement qui espérons, c’est toute la création. Toute la création espère et attend l’être humain. Toute la création attend que nous dévoilions notre vrai visage, car nous sommes à l’image de Dieu.

 

Les oiseaux et les fleurs, les reptiles et les cactus, les chats et les sapins, attendent et espèrent en nous. Ils attendent cette nouvelle terre. Ils espèrent que nous agissions comme les fils de Dieu que nous sommes, par pure grâce.

 

L’Esprit saint, Dieu avec nous, nous fait entendre cette voix invisible de toutes les créatures. Il nous crée, nous humains, à son image, pour naître en fils et filles adoptifs. Nous l’adorerons en vérité, et sa gloire rayonnera de notre visage. Voilà notre espérance, à nous tous qui sommes la création. Nous sommes sauvés.

 

Amen.

 

Contact