Courage ! (2 Corinthiens 4,16 – 5,10)

Prédication du dimanche 16 juin 2024

Quelle beauté !

Aujourd’hui, quand nous regardons le monde, ou plutôt la télévision, nous avons des raisons de désespérer. J’ai entendu à la radio une animatrice remercier d’avoir choisi l’humour comme thème d’une émission, avant d’avouer que l’omniprésence des sujets politiques du moment la déprimait. Les Français sont assez doués pour râler, nous dit-on. Oui, si facilement nous nous plaignons, nous voyons ce qui va mal, nous critiquons.

 

Mais qui dira une phrase positive, une parole valorisante, un compliment, un remerciement, un signe de reconnaissance de l’autre ? Pour compenser une parole blessante, il faut cinq ou sept paroles positives. Ce sont ces petites attentions qui embellissent la vie, qui entretiennent l’amour, qui créent du bonheur. N’oublions pas de dire à l’autre tout ce que nous aimons chez lui, et pas seulement ce qui nous irrite chez lui.

 

Oui il y a des ambitieux sans scrupules, des politiciens menteurs, et dans tous les milieux sociaux des escrocs, des arnaqueurs, des voleurs, des agresseurs ; ceux qui ne pensent qu’à eux-mêmes et à leurs envies, qui prennent quand ils peuvent le faire impunément, sans aucune morale, sans aucune limite ou inhibition, jusqu’à prendre le corps de l’autre comme un objet jetable.

 

Oui mais tous ne sont pas pourris. Il y a aussi des fonctionnaires et des ministres au service du bien commun, des travailleurs honnêtes, des hommes respectueux des femmes, des saints qui aiment leur prochain loin des caméras. On dit que les gens heureux n’ont pas d’histoire, c’est surtout qu’on ne prend pas la peine de raconter leur histoire. On raconte les drames et les tragédies, les colères et les révoltes. Mais dans le secret, derrière l’apparente banalité d’une famille ordinaire, il existe la joie, la générosité, l’entraide, l’amitié.

 

Dans nos vies, il existe des miracles, c’est-à-dire des signes de Dieu, des actions de Dieu. Si nous n’y prêtons pas attention, ils peuvent passer inaperçus.

 

A nous d’avoir le regard de Dieu, qui regarde le monde qu’il a créé, et chaque jour dit : « Que c’est beau, que c’est bon ! » (Genèse 1,4.10.12.18.21.25). Il s’extasie : Quelle beauté !

 

 

Toujours pleins de courage

Soyons toujours pleins de courage, nous dit Paul. Le courage, c’est être conscient et lucide, connaître la réalité des difficultés, et pourtant ne pas désespérer, agir malgré tout. Avant une bataille, le courage, ce n’est pas s’enivrer pour entrer dans un état second, mais c’est savoir le risque et très probablement ressentir une émotion de peur, et rester debout et agir et affronter la mort.

 

Courage face à la vie, courage d’être, courage de vivre malgré la mort, courage de s’aimer soi-même malgré ses défauts et le vieillissement qui nous enlève ce que nous étions. Courage d’espérer contre toute espérance. Cette espérance qui lutte contre la résignation, et qui se lève le matin, et qui agit.

 

Alors sur quoi se fonde ce courage surhumain ? Sur qui ? A un moment donné, nos propres forces ne suffisent plus, l’énergie nous manque, le ressort intérieur même paraît usé ; humainement, nous perdons courage.

 

Mais voici Dieu qui vient à mon secours (Psaume 54,6). Voici sa force de vie, de création, de nouvelle naissance, qui nous régénère. Voici son Esprit saint, le consolateur et le défenseur, qui vient demeurer en nous, comme un feu intérieur.

 

 

Hi anastasis : la résurrection. Icône orthodoxe, Albanie. Au centre, Jésus-Christ, surtitré en abrégé Is-Khs. Sur son auréole, ho ôn, celui qui est.

Nous marchons par la foi

Nous marchons non par la vue, mais par la foi.

 

Dans Hébreux 10 et 11, nous lisons :

« N’abandonnez donc pas votre assurance, qui comporte une grande récompense ! Vous avez en effet besoin de persévérance, pour qu’après avoir fait la volonté de Dieu vous obteniez ce qui a été promis. Car encore un peu – bien peu ! – et celui qui doit venir viendra : il ne tardera pas. Or mon juste vivra en vertu de la foi. Mais s’il se retire, mon âme ne prend pas plaisir en lui. Quant à nous, nous ne sommes pas de ceux qui se retirent pour se perdre, mais de ceux qui ont la foi pour sauvegarder l’âme. Or la foi, c’est la réalité de ce qu’on espère, l’attestation de choses qu’on ne voit pas. » (Hébreux 10,35 – 11,1).

 

La persévérance en attendant la venue du Christ, le fils de l’humain venant sur les nuées du ciel.

 

Nous ne regardons pas seulement à la terre, mais au ciel. Alors que notre corps souffre et se dégrade, nous voyons au ciel pour nous un corps glorieux, renouvelé. Alors que le citoyen que nous sommes est tétanisé par l’angoisse, ou anéanti par le dégoût, nous découvrons que nous sommes citoyens du ciel, citoyens d’un royaume qui n’est pas de ce monde, de la cité sainte, la Jérusalem céleste. Là au milieu Dieu a planté un arbre de vie qui nous attend (Apocalypse 21-22).

 

Et cette attente du ciel, du paradis, d’un au-delà, ne nous endort pas dans un doux rêve de lendemains meilleurs, comme l’illusion béate de l’opium. Au contraire, elle nous donne du courage. Quand le désespoir nous accable, l’espérance qui vient de Dieu nous relève, et la foi nous met en marche. Marcher par la foi, c’est un mouvement dynamique. L’espérance ne nous endort pas, elle nous réveille.

 

Jésus ressuscité nous ressuscite, nous relève et nous réveille. Les orthodoxes chantent sans fin à Pâques : « Le Christ est ressuscité des morts, par sa mort il a vaincu la mort. A ceux qui sont dans les tombeaux il a donné la vie. » Et quand sur un icône ils représentent la résurrection, ils dessinent Jésus qui vient tirer Adam et Eve et toute l’humanité sauvée du séjour des morts. La résurrection du Christ signifie notre propre résurrection. Nous sommes ressuscités avec le Christ, signifie que nous sommes réveillés, relevés par lui. Ainsi nous sommes pleins de courage et nous marchons par la foi.

Non par la vue

Et non par la vue. Vers l’invisible nous regardons avec les yeux du cœur, un regard spirituel.

 

« Aussi nous regardons, non pas à ce qui se voit, mais à ce qui ne se voit pas ; car ce qui se voit est éphémère, mais ce qui ne se voit pas est éternel. » Ce qui se voit, c’est la dégradation du corps. Ce qui ne se voit pas, c’est que l’être humain intérieur se renouvelle de jour en jour. C’est que notre corps est le temple de l’Esprit saint. La vie spirituelle ne vieillit jamais, Dieu ne s’use pas.

 

Ce qui se voit, c’est la terre nue et la petitesse de la graine de moutarde. Ce qui ne se voit pas, c’est l’arbre qu’elle va devenir, la forêt qu’elle va devenir après avoir produit du fruit portant semence nouvelle. Dieu sème, et nous donne à nous aussi la persévérance du semeur, qui attend que la semence invisible en terre germe.

 

 

Nous marchons vers un horizon qui nous dépasse et nous attire. Car nous sommes citoyens d’un autre monde. Notre cité se trouve dans les cieux. Nous appartenons au ciel.

 

Nous sommes les oiseaux du ciel qui font leur nid dans les branches de l’arbre de vie. Nous sommes comme les anges, si les anges ont des ailes, des créatures ailées, nous pouvons voler et nous élever dans le ciel. Nous sommes des êtres célestes, des oiseaux du ciel, dans la parabole sur le règne de Dieu.

 

D’après la lettre aux Colossiens :

« Si donc vous vous êtes réveillés avec le Christ, cherchez les choses d’en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu. Pensez à ce qui est en haut, et non pas à ce qui est sur la terre. » (Colossiens 3,1-2).

 

« Si quelqu’un est dans le Christ, c’est une création nouvelle. Ce qui est ancien est passé : il y a là du nouveau. » (2 Corinthiens 5,17).

 

La résurrection nous éclaire comme la lumière, comme une flamme de vie, une lueur d’espérance, une aurore, un lever de soleil. Dieu crée du nouveau, qui germe invisiblement. Nous-mêmes, il nous recrée, nous régénère, nous donne courage et espérance. Il nous relève pour que nous marchions par la foi à travers la vie qu’il nous donne, et que nous puissions voir comme c’est beau.

 

Amen.

 

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