Laisser résonner la parole
De façon inhabituelle, aujourd’hui les textes du jour prévoient non pas un passage de l’évangile, mais deux. Et ce qui les relie, c’est le thème du livre et de l’enseignement. Nous sommes le dimanche de la parole de Dieu.
On reconnaît souvent aux protestants un rapport particulier et intense à la parole de Dieu qui surgit à travers les mots de la Bible. Mais la parole de Dieu, en latin Dei Verbum, c’est aussi le titre d’une des quatre constitutions de Vatican II, pour dire que la parole de Dieu n’est aucunement le monopole des protestants, et qu’elle a retrouvé sa place essentielle au XXe siècle.
Dans la préface de Luc, nous entrevoyons derrière l’évangile la personne de l’écrivain, et son projet, et aussi la personne à qui il s’adresse, Théophile. Et si la démarche d’interroger des témoins peut nous faire penser au travail d’un journaliste ou d’un historien, la présence de l’auteur nous souligne aussi que c’est un texte engagé, un texte de foi.
La tradition de l’Église a retenu dans le canon quatre évangiles, comme quatre témoignages, qui racontent globalement la même histoire, mais avec la diversité de quatre voix, quatre points de vue et des nuances distinctes. L’Église n’a pas choisi d’effacer les différences, ou de choisir un seul des quatre, mais elle a préférer garder cette diversité.
De même les croyants sont très variés aujourd’hui, dans des Églises différentes ou des sensibilités différentes au sein de la même Église. Et nous prions pour l’unité, pour que l’amour véritable règne entre nous, et que nous vivions en sœurs et frères. Et en même temps cette pluralité de voix, de sensibilités, de manières de prier, de goûts musicaux, c’est aussi autant de témoignages uniques et singuliers d’une relation personnelle à Dieu.
Luc écrit son évangile pour une personne, Théophile. Mais le nom Théophile veut dire « ami de Dieu », « amoureux de Dieu ». L’amour philia, par rapport à l’amour agapê, insiste sur l’affection, le sentiment, sentiment d’amitié ou sentiment amoureux ; faire un baiser s’exprime avec la même racine. Donc l’évangile de Luc s’adresse à tous ceux qui ont des sentiments pour Dieu.
Et Luc donne un enseignement comme une catéchèse, car il emploie le verbe qui a justement donné le mot catéchèse, qui a donné aussi écho. Luc a écrit, dit-il à l’ami de Dieu, « afin que tu reconnaisses la certitude des enseignements que tu as reçus. » Ou encore « afin que tu reconnaisses la sûreté des paroles dont tu as résonné. » Oui être catéchisé c’est écouter et laisser résonner en soi les paroles de Dieu, comme Marie déposait les paroles et les événements dans son cœur, comme un trésor.