Le beau berger (Jean 10,11-18)

Prédication du dimanche 21 avril 2024

La beauté cachée

Qui est ce berger, pour nous ? Il n’est pas si facile de recevoir avec bonheur cette parole qui semble faire de nous de simples brebis, alors que dans notre culture le mouton a la réputation de suivre bêtement celui qui le précède, sans se poser de questions.

 

Mais si nous entrons dans cette image, profondément et bibliquement, sa beauté nous apparaîtra. Justement, il serait plus juste de traduire « le beau berger », ce qui change un peu le regard. En grec, Jean emploie bien l’adjectif kalos, beau, qui a donné par exemple la calligraphie, la belle écriture. Pourtant, toutes les traductions, sauf Chouraqui, écrivent « le bon berger », comme si la beauté de Jésus nous choquait, comme si elle devait forcément se lire sur un plan moral et spirituel, et exclure la beauté physique, esthétique, artistique, gratuite. Je crois que Jésus a cette unité de la beauté intérieure et extérieure. Si souvent, c’est le sourire qui révèle la beauté d’un visage. C’est la joie qui nous illumine ; et elle se voit physiquement.

 

Le berger prend soin de ses brebis, les nourrit, les protège. Il a la douceur et la force, la paix et l’autorité.

Le dirigeant selon le cœur de Dieu

Nombreux sont les bergers dans la Bible : Abel, Rachel, Jacob, Joseph, Moïse… Et le jeune David est présenté comme un berger, roux, aux jolis yeux et au beau visage. Et ceux qui ont appris à mener les bêtes au pâturage peuvent aussi diriger le peuple selon la voie de Dieu.

 

La métaphore du pasteur est devenue transparente dans la Bible. Jésus ne parle pas vraiment d’agriculture, mais de celui qui conduit le peuple. L’image est plus politique que bucolique. Il dit en substance : Je suis le beau guide, le bon dirigeant, par opposition à beaucoup d’autres. Je suis le seul pasteur de l’Église. Je suis le roi d’Israël, le roi des Juifs. Je suis le Messie.

 

Mais sa manière d’exercer le pouvoir n’est pas la nôtre. Il règne comme un beau berger, qui fait passer avant lui-même le souci de ses bêtes, parce qu’il les aime.

 

Les trois grands prophètes Ésaïe, Jérémie, Ézékiel, parlent beaucoup des bergers. Ainsi Jérémie :

« Je vous donnerai des bergers selon mon cœur ; ils vous feront paître avec intelligence et bon sens. » (Jérémie 3,15).

Quand tous les rois et les chefs s’éloignent de Dieu et mènent le peuple à sa perte, le peuple attend des bergers justes, des hommes politiques intègres, des dirigeants selon le cœur de Dieu qui les sauveront.

Dieu berger

Et en arrière-plan aux mots de Jésus, nous pouvons entendre Ézékiel 34, une espérance, une promesse, une bénédiction :

« 11Car ainsi parle le Seigneur DIEU : Je vais moi-même prendre soin de mes bêtes et les passer en revue. […] 14Je les ferai paître dans un bon pâturage, et leur domaine sera sur les montagnes qui dominent Israël ; là elles se coucheront dans un bon domaine, et elles pourront paître dans de gras pâturages, dans les montagnes d’Israël. 15C’est moi qui ferai paître mon troupeau, c’est moi qui ferai coucher les bêtes – déclaration du Seigneur DIEU.

 

16Je chercherai celle qui est perdue, je ramènerai celle qui est égarée, je panserai celle qui est blessée et je ferai reprendre des forces à celle qui est malade. […]

 

23Je nommerai à leur tête un seul berger qui les fera paître, David, mon serviteur ; il les fera paître, il sera leur berger. 24Moi, le SEIGNEUR, je serai leur Dieu, et David, mon serviteur, sera prince au milieu d’eux – c’est moi, le SEIGNEUR (YHWH), qui ai parlé. 25Je conclurai pour eux une alliance de paix et je ferai disparaître du pays les animaux féroces ; ils habiteront en sécurité dans le désert et dormiront au milieu des broussailles. 26Je ferai d’eux et des environs de ma colline une bénédiction ; j’enverrai la pluie en son temps, ce seront des pluies de bénédiction. »

Ici réapparaît David, un David idéal, comme roi berger et serviteur de Dieu. « Il y aura […] un seul berger » : Jésus, qui est donc bien le fils de David, et porte son nom.

 

Mais ce berger va au-delà d’un dirigeant humain. Car devant la faillite des mauvais pasteurs, Dieu lui-même décide d’assumer les fonctions du berger. « Le SEIGNEUR est mon berger » dit le psaume 23 (Ps 23,1). C’est lui que je suivrai, et nul autre que lui.

 

Et voici la bonne nouvelle d’Ésaïe 40 :

« 9Quant à toi, monte sur une haute montagne, Sion, joyeuse messagère, élève avec énergie ta voix, Jérusalem, joyeuse messagère élève-la, ne crains pas, dis aux villes de Juda : « Voici votre Dieu, 10voici le Seigneur DIEU ! Avec vigueur il vient, et son bras lui assurera la souveraineté […] 11Comme un berger il fait paître son troupeau, de son bras il rassemble ; il porte sur son sein les agnelets, procure de la fraîcheur aux brebis qui allaitent. »

Dieu est notre berger dans sa douceur, sa protection, dans son rôle vétérinaire et maternel. Voici comment Dieu règne. La puissance de Dieu n’est pas celle des hommes et des armes, mais de la paix et de l’amour, de la simplicité et de la beauté.

Le berger qui donne sa vie

Et habituellement, si un berger élève des moutons, c’est pour un jour faire un méchoui, ou offrir l’agneau pascal. Le mouton dans la Bible, est par excellence la bête qui est sacrifiée. Mais voici un renversement, une révolution : ce ne sont plus les brebis qui meurent pour le berger ; c’est le berger qui meurt pour ses brebis. C’est Jésus qui risque sa vie, qui expose sa vie, et qui finalement meurt pour nous, meurt à notre place. Il donne tout pour nous.

 

Voici notre Dieu, voici le vrai berger, celui que je veux suivre. Oui Seigneur, emmène-moi sur les sentiers de la justice, dans ton amour. Amen.

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