Attente
Voici un couple, Zacharie et Élisabeth, pour qui tout va bien en apparence, mais qui porte une douleur intime, à la fois secrète et publique, la stérilité. Car dans l’Ancien Testament, la fécondité est une bénédiction.
Pourtant ils sont justes, irréprochables. Ils sont de la tribu de Lévi, d’une famille de prêtres, et Élisabeth descend même d’Aaron le premier grand-prêtre, et porte le même nom que la femme d’Aaron, Élishéba (Exode 6,23). Donc ils viennent d’une bonne famille, et sont fidèlement pratiquants. Et s’ils sont appelés justes, c’est que leur foi est grande et sincère.
Simplement comme Job, et comme tous les humains, ils connaissent aussi le malheur.
Oui pour plusieurs d’entre nous, nous pouvons nous sentir proches de Zacharie et d’Élisabeth, dans une vie de foi réelle, mais qui n’est pas épargnée par la souffrance, ou un regret, une insatisfaction. Zacharie prie pour avoir un enfant. Nous avons des désirs à demander à Dieu, nous sommes en attente. Nous attendons une vie plus épanouie encore, plus accomplie.
Dans cette situation, il y a d’abord la prière. Et ce n’est pas seulement la prière solitaire d’un individu face à son Dieu ; mais c’est une prière communautaire. « Toute la multitude du peuple était en prière au-dehors à l’heure de l’offrande de l’encens. » Même si seuls Zacharie et en principe quelques autres avec lui entrent à l’intérieur du sanctuaire, la communauté du peuple est en prière avec lui. Et nous aussi, notre prière n’est pas seulement la nôtre, mais elle est portée dans l’unité par toute une Église invisible, en communion des saints. Et la prière s’élève vers Dieu comme un encens, comme un parfum, une nuée odorante qui se diffuse vers le ciel.
À travers la liturgie, à travers l’offrande à brûler, à travers l’institution des prêtres et du temple, se vit aussi une foi fervente et profonde. A travers une prière quotidienne et ancrée dans notre emploi du temps, à travers le culte du dimanche et nos autres rendez-vous avec Dieu, nous faisons entrer Dieu dans notre vie, et il est présent. Car le temple, le sanctuaire de L’Esprit saint, c’est nous-mêmes. Nous pouvons ainsi entrer dans notre lieu intérieur le plus saint, pour adorer Dieu.
C’est ainsi que Zacharie et Élisabeth patientent avec fidélité, et espèrent avec persévérance. Ils continuent à espérer malgré le temps qui passe, et qui, à mesure qu’ils avancent en âge, rend de plus en plus improbable qu’ils deviennent un jour parents. Nous voyons même que Zacharie a cessé de croire à un fils – et c’est humain, et c’est rationnel. Mais il continue de croire en Dieu, de prier, de lui faire confiance pour sa vie, d’espérer un bel itinéraire selon le désir de Dieu, même sans savoir où il les conduira. Ainsi nous prions : « Que ta volonté soit faite (que ton désir soit fait) comme au ciel, aussi sur la terre. » Ou comme écrit joliment la TOB :
« fais se réaliser ta volonté sur la terre à l’image du ciel » (Matthieu 6,10).
Restons ouverts nous aussi à l’inattendu de Dieu, qui a plus d’une manière de nous surprendre.
La plupart du temps, notre prière est ordinaire, et Zacharie ne voit pas l’ange Gabriel. Mais il peut arriver aussi que Dieu se révèle d’une façon extraordinaire, que nous sentions vraiment sa présence, que nous recevions une réponse claire de sa part, un message. Alors pour ces instants bénis que Dieu nous donne, il vaut la peine de prendre le temps de prier, et d’inscrire Dieu dans notre vie, de le graver sur notre cœur, de même qu’il écrit notre nom sur la paume de ses mains. Même quand il ne se passe rien en apparence, Dieu est là, il nous écoute.
Nous entrons aujourd’hui dans le temps de l’Avent, un temps d’attente et d’espérance. Un temps privilégié pour prier, pour renouer une relation avec Dieu qui a pu se distendre.
Celui que nous attendons, c’est le Messie.