Les peurs
Les peurs de la traversée de la vie
Mais dans les eaux tumultueuses, notre cœur est agité par des tourbillons, des tornades, de l’écume et des vagues. Comment ne pas être entraîné par le vent et déporté par les flots ?
Les peurs existent ; des émotions nous submergent. Peur de la guerre, de la violence, de la mondialisation, de l’intelligence artificielle et des réseaux sociaux, des opinions et des modes de vie qui ne sont pas les nôtres, des radicalisations, des fanatismes, des catastrophes climatiques, de l’avenir du monde et de nos enfants. Peur de la pauvreté, de la spirale des addictions, de la solitude, de la mort ou de la vie. Peur de ne pas être aimé, de ne pas arriver à vivre, de ne pas être assez beau, grand, fort, intelligent, performant, dynamique. Des peurs collectives, pour la société, la planète ; et des peurs personnelles, intimes, affectives, secrètes.
Oui ces émotions existent, ressentons-les, exprimons-les. Mais qu’elles ne viennent pas nous engloutir, nous noyer ! Que la panique ne nous domine pas ! Il est vrai, le vent et les vagues ne sont pas des illusions. Mais à partir de là, il y a un mensonge, une fausse information, une propagande ennemie. Les disciples s’écrient : « nous sommes perdus et tu ne t’en soucies pas ? » Double erreur. À côté de la vérité du vent et des vagues, qui submerge nos pensées, il y a pour la nuancer cette autre vérité à ne pas oublier : un, nous ne périssons pas ; et deux, Jésus se soucie de nous, puisqu’il est là dans la barque, tout prêt à agir.
Jésus impose silence à toutes ces voix de peurs mensongères, il fait taire ces folles agitations. Il donne le grand calme.
Les peurs spirituelles
Plus subtiles, il existe aussi des peurs spirituelles. Au fond, nous pouvons avoir peur de l’absence de Dieu, peur que Dieu soit endormi et ne se réveille pas, peur que Dieu soit mort. Mais Jésus se lève et se révèle.
Il existe encore la peur de l’enfer, autrement dit la peur de ne pas être sauvé. Nous savons et nous affirmons que nous sommes sauvés par la foi, c’est l’évangile de notre bonheur. Oui mais la peur revient, quand Jésus dit : « N’avez-vous pas encore de foi ? » J’ai peur de ne pas avoir la foi. Aurai-je plus de foi que les disciples ? N’ai-je aucun doute, aucune peur ? Qui peut affirmer avoir la foi, la tenir fermement et posséder cette confiance absolue en Dieu ?
Eh bien ce texte dit une chose étonnante. Nous ne sommes pas sauvés par la foi. Les disciples n’ont pas la foi ; ils sont sauvés malgré tout. Ils sont sauvés par leur prière incrédule, l’action désespérée d’appeler Jésus au secours, comme les cris des psaumes. Et avant toute chose, Jésus les sauve de la tempête. Ensuite seulement, il les encourage à avoir la foi. La foi n’est pas une condition pour être sauvé. Le salut est donné d’abord, la foi est une conséquence. Parce que nous connaissons le Dieu sauveur et son amour pour nous, et que nous l’avons vu en action, nous avons confiance en lui et nous n’avons pas peur.
Nous sommes sauvés même sans la foi, par l’amour de Dieu. C’est le message inattendu de ce texte. Avant la foi, Dieu nous aime et nous sauve.
Et maintenant que nous sommes sauvés, alors Jésus nous appelle à la foi. Il ne nous appelle pas à nous satisfaire de notre manque de foi, à nous complaire dans nos doutes, à penser la foi inaccessible. Il nous appelle à nous savoir sauvés, à bannir la crainte, à croire en sa personne, en sa présence vivante. Nous portons Jésus en nous, mais trop souvent il est dans notre cœur comme endormi, comme mort. Mais Jésus est le vivant, réveillé de la mort ; et notre Église connaîtra un réveil, et notre cœur vivra une résurrection. Nous n’avons pas la foi, pas encore ! Ce « pas encore » vaut une promesse. Nous aurons la foi.