Vocation (Philippiens 3,1-11)

Prédication du jeudi 11 juillet 2024, chez les diaconesses du Moûtier Saint-Voy.

À réécouter sur le site des diaconesses de Reuilly : office du 11 07 24 à 20:30 au Moûtier.

 

Le Moûtier, au Mazet-Saint-Voy (Haute-Loire).

Paul témoigne

Le texte d’aujourd’hui nous parle de consécration à Dieu.

 

Paul raconte qu’il pourrait mettre sa confiance dans la chair. Qu’est-ce que ça veut dire ? La chair, c’est ce qui est simplement humain, corporel. Ici Paul fait référence à sa généalogie, sa lignée, son ADN, son identité biologique. Et il évoque la circoncision. La circoncision est positive, c’est un signe d’alliance avec Dieu, d’engagement et de fidélité. Paul pensait ainsi avoir tout ce qu’il fallait pour être un bon juif, en ajoutant le zèle, l’action. C’était sa fierté d’être irréprochable.

 

Et puis survient Jésus-Christ. Et Paul ne sera plus jamais le même. Sa conversion est un retournement, un renversement. Le gain devient une perte. L’activisme devient persécution : la fierté d’avoir éliminé beaucoup de chrétiens devient la honte d’avoir assassiné le peuple de Dieu.

 

La circoncision devient « mutilation ». C’est un mot terrible. La circoncision qui devait être un signe de sainteté s’avère un sacrifice inutile. Elle sépare doublement. Elle sépare hommes et femmes puisqu’elle ne s’adresse qu’aux hommes ; et elle sépare les juifs des non-juifs, comme une race à part, les circoncis contre les incirconcis. La nouveauté de l’évangile, c’est que ces distinctions sont abolies, il n’y a plus ni circoncis et incirconcis, ni homme et femme. Le peuple de Dieu est ouvert à tous !

 

Nous sommes appelés à devenir les vrais circoncis en découvrant le sens spirituel de la circoncision. Déjà dans le Deutéronome, nous trouvons ce sens :

« Le SEIGNEUR, ton Dieu, circoncira ton cœur et le cœur de ta descendance, pour que tu aimes le SEIGNEUR, ton Dieu, de tout ton cœur et de toute ton âme, afin que tu vives. » (Deutéronome 30,6).

 

Les vrais circoncis célèbrent le culte par l’Esprit de Dieu. Jésus dit à la Samaritaine :

« Le salut vient des Juifs. Mais l’heure vient – c’est maintenant – où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; car tels sont les adorateurs que le Père cherche. » (Jean 4,22-23).

 

Ce qui compte, ce n’est plus d’appartenir à la descendance d’Abraham selon la chair, à Israël, à Juda. Ce qui compte, c’est d’adorer Dieu spirituellement, c’est d’avoir le cœur circoncis, c’est-à-dire un cœur marqué par l’amour de Dieu, blessé merveilleusement par cet amour qui lui permet d’aimer. L’amour de Dieu est comme le sang dans le cœur. Le cœur est un muscle qui reçoit le sang plein d’oxygène et qui le renvoie vers tous les membres du corps. Le cœur spirituel reçoit l’amour de Dieu palpitant de vie et le renvoie vers tous les membres du corps du Christ.

 

Dieu donne-nous d’être de vrais adorateurs, de vrais circoncis, consacrés à toi !

 

Paul découvre qu’il avait tout faux, que sa propre justice de la loi ne vaut rien. Dieu seul nous justifie ; il nous donne d’être justes par la foi, même pas par notre propre foi, mais par la foi du Christ.

 

Je témoigne

L’expérience de Paul peut sembler loin de nous. Alors je voudrais témoigner. Depuis mon enfance, j’ai été poussé par le perfectionnisme, la volonté d’être le premier, et en particulier d’avoir des bonnes notes à l’école. C’était une motivation puissante et efficace. Et même si extérieurement je faisais le modeste, intérieurement, j’en étais fier. Je ne voyais pas que cela impliquait aussi la solitude.

 

Et dans le domaine spirituel aussi, j’ai pu vouloir être un bon chrétien, un bon élève de la foi, sage et scrupuleux, en faisant bien ce qui est demandé.

 

J’ai été attiré par l’idée de liberté chez Jean-Paul Sartre, le libre arbitre, la liberté de choix, pour poser des actes qui définiraient qui je suis. Cela parlait à ma jeunesse où je sentais face à des choix, où de nombreux possibles s’offraient à moi.

 

J’ai fait de belles études, j’ai travaillé dans l’administration en économie. Et puis j’ai senti aussi mes limites physiques, mes faiblesses, car je suis cardiaque. Je ne pourrai pas toujours maintenir le rythme, faire toujours plus, toujours mieux, en croissance perpétuelle. J’ai été aussi déçu, ce qui m’avait passionné m’intéressait moins, me motivait moins, je n’étais pas comblé, je cherchais toujours ma voie.

 

Alors j’ai reçu la vocation. J’ai senti que Jésus s’adressait aussi à moi quand je lisais ces mots : « Suis-moi ! »

 

Jean Baptiste dit : « Il faut que lui croisse et que, moi, je diminue. » (Jean 3,30). En faisant l’expérience de l’âge adulte et de la faiblesse, je comprends que je dois vivre non par mes propres forces, mais par le don de Dieu. M’abandonner à Dieu.

 

Perdre, gagner, choisir

« Mais ce qui était pour moi un gain, je l’ai considéré comme une perte à cause du Christ. » La vocation, la consécration à Dieu est-elle une perte, un sacrifice ? Non car ce qui nous perdons était sans valeur. Nous ne perdons rien d’important. Il faut faire des choix. Nous perdons d’un côté, mais nous gagnons infiniment plus.

 

La vérité réside dans cette perte, ce dépouillement, cet abandon, cette proximité spirituelle au Christ crucifié. Nous sommes avec lui. Rien d’autre n’a d’importance. Comme deux amoureux seuls au monde. Nous sommes avec lui dans la mort, la souffrance. Alors il nous entraîne aussi dans la résurrection. Il nous donne la vie pleine et entière que nous cherchions. Nous gagnons le Christ, nous gagnons tout. Il est notre joie.

 

Toujours dans le Deutéronome :

« J’ai mis devant toi la vie et la mort, la bénédiction et la malédiction. Choisis la vie, afin que tu vives, toi et ta descendance, en aimant le SEIGNEUR, ton Dieu, en l’écoutant et en t’attachant à lui : c’est lui qui est ta vie, la longueur de tes jours. » (Deutéronome 30,19-20).

 

Seigneur, de nouveau je me donne à toi. Donne-moi de t’adorer en Esprit et en vérité. Purifie-moi de mes orgueils, et circoncis mon cœur. Consacre-moi pour que j’abandonne l’accessoire, les désirs et les ambitions humaines. Viens, donne-moi l’Esprit saint. Qu’il crée en moi un être humain nouveau. Que ma vie et mes actes ne viennent pas de moi mais de toi. Que je vive de la source inépuisable de ta grâce. Que je vive de ton sang, le sang de l’alliance pour emplir mon cœur d’amour. Donne-nous la vie, à l’infini.

 

Amen.

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