Sortir de terre
Joie de vivre
Les deux premiers serviteurs font l’expérience de cette joie, quand leur seigneur leur dit : « Entre dans la joie de ton seigneur. » Ne passons pas trop vite sur les exemples réussis. Deux fois sur trois, l’expérience est très positive. Ne nous focalisons pas tout de suite sur les problèmes du troisième serviteur. Si vite, nous nous arrêtons sur nos appréhensions et nos inquiétudes, pour nous et pour l’Église. Souvenons-nous de tout ce qui a bien marché, de tout ce qui nous donne tant de joie. Merci Seigneur pour toute cette joie, pour tout ce qui a porté du fruit, fructifié, qui a doublé ce que nous avions apporté, tout ce qui s’est démultiplié, qui a grandi comme un arbre, qui a donné une récolte au centuple.
Enterré confiné
Et puis il y a le troisième serviteur, qui colore d’une certaine ombre le tableau, jusqu’aux ténèbres évoquées à la fin. D’abord en rhétorique comme en peinture, le contraste produit un effet plus saisissant, et aide à faire passer le message. C’est comme le sel – ou le café. Ça nous réveille, ça nous stimule, ça nous évite de nous endormir. Oui l’enjeu est grave, et n’est pas à prendre à la légère.
Quel est le risque illustré par cet esclave ? Qu’est-ce qui lui est reproché ? Ce n’est pas son incompétence, mais son manque de confiance et d’espérance. Autrement dit son manque de foi.
Il ne manquait pas de talent. Il avait un seul talent, mais c’était suffisant. Il était millionnaire. Nous aussi nous sommes millionnaires des talents divins, de l’amour du Père, qui vaut plus que l’or.
Son seigneur ne lui demandait pas d’accomplir des œuvres extraordinaires, ni de travailler jour et nuit. Il demandait simplement de confier le talent aux banquiers, au lieu de le cacher dans la terre. Dieu nous demande le possible, et c’est lui qui fait l’impossible.
Enfouir son talent dans la terre, signifie se replier sur soi. Et cette tentation peut nous guetter, particulièrement avec les habitudes héritées du confinement. Et l’hiver arrivant, nous avons peut-être envie de nous calfeutrer chez nous devant un écran de télévision ou d’ordinateur.
Beaucoup d’associations connaissent encore aujourd’hui une participation plus faible qu’avant le Covid. Il y a des cas pathologiques où les gens ne sortent plus de chez eux. Et ils vivent dans un univers virtuel, à distance de l’autre. L’univers virtuel, ce n’est pas d’abord vivre dans un monde parallèle qui s’appellerait le multivers. C’est beaucoup plus simplement se divertir, s’évader hors du quotidien dans des films et des séries, des jeux vidéos, imaginaires et assez loin de la réalité de la vie.
Et ce sont des bonnes choses, mais n’en devenons pas esclaves ! Évitons de nous enterrer dans une pièce sans voir le soleil, sans voir des gens. Évitons de nous enfermer peu à peu dans la solitude, dans l’isolement qui touche tant de monde. En ville, souvent nous ne connaissons même plus nos voisins.
Ne nous enterrons pas encore, puisque nous sommes vivants ! Dieu appelle le serviteur à ne pas avoir peur, à oser, à avoir confiance, à vivre ! Et même dans l’Église nous sombrons parfois dans la dépression : Oh, on n’a plus de jeunes, on est moins nombreux, à quoi bon ? Mais Dieu nous dit qu’il faut y croire, croire en lui et en l’avenir qu’il nous donne. Et oser simplement faire ce premier acte de foi, qui est de mettre à disposition nos talents. Choisir d’espérer au lieu de désespérer.